Certaines assimilent à tort la broderie indienne, si variée, si complexe, si particulière à chaque région, à la profusion de miroirs. Détrompons-les et découvrons un art du temps passé si rare et peu connu: la broderie Phulkary. (et il y en a d’autres)
पंजाब की कढ़ाई= Pan̄jāba kī kaṛhā’ī = Broderie du Pendjab
Lors de mon 4° voyage en Inde, j’avais tenu à revenir au Craft museum de Delhi (où j’étais allée une 1° fois quatre ans auparavant mais sans avoir suffisamment de temps), lieu d’une richesse incroyable en textiles, mais mal conservés, mal présentés, mal éclairés. J’avais été fascinée par leurs kanthas qui ne ressemblent pas du tout à ce qu’on montre en général en France, et surtout intriguée, émerveillée par la broderie du Punjab (ou Penjab ) le phulkary (qui signifie « travail de la fleur » (फूल = phūla), vous verrez plus loin que ces fleurs assemblées constituent un jardin (bagh ou बगीचा )! J’espère que je ne vais pas vous ennuyer (sauf les très curieuses!) car j’ai tenté de répondre à certaines de mes propres interrogations.
Photo personnelle: Ce travail ressemble à celui-ci (avec photo de plus près prise sur un site très documenté que je vous recommande (en anglais) http://www.indianheritage.biz/Phulkari.html et une video ici:https://www.youtube.com/watch?v=pTBoyU2-MCg Je signale au passage un autre musée textile passionnant à Ahmedabad (le Calico museum -sarabhai foundation) sans doute plus pédagogique et où je suis passée trop vite également faute de temps (mais pas de désir!) Cet article se clôt sur deux photos du Calico museum! http://calicomuseum.org
A mon retour en France, j’ai cherché dans LA bible indispensable (je vous le recommande!) world textiles et j’y ai bien entendu trouvé une bonne page illustrée sur ce thème:Je me suis donc lancé un défi : celui de faire ma propre modeste broderie; pourquoi modeste?. Parce qu’elle l’est forcément! La phulkary est l’oeuvre d’une vie; lorsqu’un enfant naît sa famille commence à broder un châle! Les femmes de la famille, parfois les hommes, brodent toute une surface et normalement, on ne trouve pas à vendre ces oeuvres familiales ! De même, on ne s’asseoit pas dessus, c’est trop fragile, donc pas de plaid ni de vêtements!
Maintenant, parfois, on trouve de la broderie phulkary brodée à la machine!! mais bien sûr ce ne sera pas en soie; exemple dessous:
Car la broderie est si longue à faire et si coûteuse que les indiens brodent ces points lancés non pas en repassant dessous (ce qui serait dispendueux et la soie s’userait) mais en repiquant juste à côté, ce qui fait que l’envers ressemble à une suite de points devant (Voir ***)! Les motifs peuvent être des « tournesols » géométriques ou des sortes de « sampler » (le surajmukhi ou les Bawan Bagh)
tournesol= सूरजमुखी se prononce sūrajamukhī
Sur la Toile (la justement nommée!) vous trouverez des vêtements à vendre, mais ils ne sont pas en soie, et brodés machine, ce n’est pas la tradition! Exemple:
Normalement, dans la broderie Phulkary toute la surface est recouverte, à un point qu’on peut ne pas apercevoir le fond ; on est alors devant un « jardin »(bagh = jardin) même si le voir permet de créer des effets!!
J’ai pris un morceau de coton grenat (on brode ces points de soie sur ce matériau le khaddar souvent teint à la main) sur du coton (voir 1); j’ai eu la chance -j’en ai alors parlé sur mon blog-de recevoir tout un carton d’écheveau d’une soie aujourd’hui introuvable (soie non tressée appelée pat par les habitants-brodeurs du Penjab)! Elle est difficile à travailler mais chatoyeuse; j’ai recopié un dessin très traditionnel mais normalement, il faut savoir que les indiens, ont des tampons spécifiques de ces motifs et ils les juxtaposent afin de recouvrir leur surface! J’ai commencé, mais à pas de tortue car je fais des tas de choses à la fois………..Fin octobre, en tentant de me documenter sur le sujet, alors que je terminais à peu près le 1° quart, je suis tombée sur le blog du Chas et de la louche: Passez vous y documenter! http://labarge.canalblog.com Et là, une info: Dans un numéro de mars 88 de Cent idées, il y avait un article sur le sujet; j’ai quasiment à quelques numéros près, toute la collection, j’ai vite retrouvé ce magazine! Car, la broderie étant très traditionnelle et transmise de mère en fille, les archives sur le sujet manque! Ces broderies ponctuent les grandes fêtes familiales
1- Le thirma sur fond blanc était porté par les veuves et les femmes d’âge mûr.
Précautions: Cela vaut le coup d’essayer; si vous en avez envie, il faut impérativement protéger le fil de soie en enrubannant le cercle à broder (nos grands-mères le faisaient, mais avec les fils modernes, ce n’est plus utile !):
voilà donc le 1° quart de la broderie, mais la photo (mauvaise) ne rend pas du tout les reflets de la soie; je vous montre aussi l’envers (***)afin que vous voyiez qu’il ne s’agit pas d’un point lancé (satin stitch) traditionnel!
« Homère et Pindare appelaient symbola les fragments de tessère brisée lorsque les héros se quittaient. A leur retour, les années ayant passé, les héros réajustaient les bords. A l’instant où s’EMBOITAIT EXACTEMENT LEUR MORCEAU DE PUZZLEe dans l’autre morceau de puzzle, les yeux reconnaissaient les visages ». Pascal Quignard
A suivre selon l’avancée du projet (3 autres parties du puzzle et une bordure en dents de scie tradtionnelle de la broderie phulkary); je pensais en faire un coussin, mais j’ai une autre idée qui me plaît assez, mais qui n’est pas utilitaire! De toutes façons, ce n’est pas pour tout de suite!
Fin de cet article avec 2 photos du Calico museum d’Amhedabad situé dans une « haveli », c’est à dire une riche maison traditionnelle indienne : A mercredi soir (sinon vendredi!), bons baisers à toutes!